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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 101, septembre-octobre 2015 > Grèce : Syriza, du gouvernement « anti-austérité » au reniement

Grèce : Syriza, du gouvernement « anti-austérité » au reniement

Les réactions populaires et ouvrières

Mis en ligne le 6 octobre 2015 Convergences Monde

Avant la crise de la dette en 2010, un mouvement étudiant de plusieurs mois avait marqué le climat social en 2008. Dans ce pays où seuls 30 % d’une classe d’âge accédaient à l’université moyennant des frais d’inscription élevés et donc des emprunts étudiants lourds, la jeunesse scolarisée avait tout de même su trouver l’oreille d’une large partie de la population et mordu sur la jeunesse ouvrière ou privée d’emploi. Les manifestations se multipliaient et les jeunes se sont reconnus sous l’appellation « génération 700 euros », en référence au montant indigne du Smic de l’époque. Après trois mémorandums, celui-ci s’élève aujourd’hui à 580 euros… Le 6 décembre 2008, un jeune était tué dans une manifestation par les MAT, les CRS grecs, déclenchant une vague d’indignation qui s’est exprimée dans la rue.

Les « indignés », sur la place Syntagma

Entre 2010 et 2012, le plus souvent sous la forme de journées d’action syndicales, de nombreuses manifestations massives ont réuni des travailleurs. Les « indignés » ont fait irruption en 2011 sur la place centrale d’Athènes, la place Syntagma, suivant en cela l’exemple des révolutions arabes, regroupant une jeunesse d’horizons sociaux divers, rassemblée par une révolte commune mais dont la confusion en termes de classe s’est traduite par le mot d’ordre creux de « Démocratie réelle maintenant ».

Ce type de démonstration de force a culminé le 28 octobre 2011, le jour de la fête nationale, lorsque, partout dans le pays, les officiels ont été conspués, le Président de la République étant même dégagé de sa tribune à Thessalonique. On rapporte aussi dans cette période que des groupes de manifestants interpelaient jusque devant leur domicile des politiciens locaux et députés qui votaient les mesures d’austérité !

Ces journées de grève ou ces occupations des indignés, aussi massives et importantes qu’elles aient pu être, n’étaient pas des mouvements dont les initiateurs fixaient aux participants des objectifs leur permettant de tenir dans la durée, de pouvoir s’organiser eux-mêmes, apprendre à avoir de la suite dans les idées et donc faire de la politique. Mais les travailleurs et la jeunesse grecs s’en sont emparés pour exprimer clairement et fermement leur rejet des mémorandums et des mesures d’austérité. Ni plus, ni moins.

Dans les entreprises et les services publics

Les conflits ont aussi existé dans les petites et les grandes entreprises, dans les services publics. Elles sont ici mal connues et il est très difficile d’avoir une idée précise de leur nombre, leur durée et leur portée. Dans quelques cas, des militants ont tenté de faire connaître leur lutte au-delà des frontières grecques.

C’est le cas des femmes de ménage du ministère des Finances, qui ont été licenciées en septembre 2013 mais qui ont organisé des piquets quotidiens, au niveau national, devant toutes les antennes du ministère et obtenu leur réintégration en février dernier. Des dispensaires « sociaux et solidaires » sont nés un peu partout sur le territoire grâce à des professionnels de la santé qui ne voulaient pas se résigner à la casse de l’hôpital public – un quart des hôpitaux du pays a fermé ! Des grèves, malheureusement en pointillés, sont régulièrement organisées contre la privatisation en cours du port du Pirée. Les techniciens et journalistes de la télévision publique ERT se sont fait connaître en continuant d’émettre alors que le gouvernement de Samarás avait décidé de fermer l’antenne. Ils auront tenu jusqu’à la décision de réouverture prise par le gouvernement Syriza (mais qui, comme toutes les lois passées depuis février, risque d’être annulée par le 3e mémorandum).

Enfin, face à la vague de fermetures d’usines, quelques travailleurs, dos au mur, ont décidé d’utiliser leur outil de travail pour continuer la production. C’est le cas de la cimenterie Halkida (filiale de Lafarge), d’une usine d’aluminium à Viotia ou de l’usine Vio.Me à Thessalonique. Les ouvriers de Vio.Me, apparemment conscients du piège que représente le fait de s’isoler dans une expérience de coopérative, ont organisé une « caravane des luttes et de la solidarité » qui a sillonné le pays avec des représentants de toutes les luttes que nous avons citées, terminant sa route au ministère du Travail le 6 avril dernier… et n’obtenant même pas un rendez-vous du « camarade ministre » de Syriza.

Mais ces initiatives sont malheureusement peu nombreuses et assez isolées. La Grèce n’a pas encore connu de lutte d’ensemble prolongée contre les mémorandums. Donc pas de victoire, même partielle. Cela dit, les travailleurs grecs ne sont pas sous le coup d’une défaite, tout au plus d’une désillusion par rapport au gouvernement Syriza. Même si la bourgeoisie est parvenue à faire passer bien des attaques, d’autres affrontements sont certainement à venir.

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