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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 7, janvier-février 2000 > DOSSIER : A la veille du XXXe congrès : où va le PCF ?

DOSSIER : A la veille du XXXe congrès : où va le PCF ?

Les enjeux du 30e congrès

Mis en ligne le 1er février 2000 Convergences Politique

Pour la direction du PCF le trentième congrès qui doit se tenir fin mars a trois objectifs : constituer une nouvelle étape dans l’évolution qui fera du PCF un parti d’alternance à part entière, à l’instar de n’importe quel parti social-démocrate par exemple ; calmer et rassurer les nombreux militants inquiets ou mécontents devant une participation gouvernementale qui est loin de les avoir convaincus ; enfin accessoirement faire face à ses oppositions plus ou moins organisées.

Lever les derniers obstacles

Pendant longtemps le PCF a constitué un cas bien particulier sur la scène politique française, un parti qui ne pouvait pas être totalement assimilé non pas parce qu’il était encore révolutionnaire comme le prétendaient ses dirigeants mais à cause de ses liens avec la bureaucratie russe d’une part et la classe ouvrière de l’autre. L’effondrement de l’URSS l’a définitivement libéré de la première de ces entraves.

Pour que l’évolution soit complète vers un parti dont la seule préoccupation sera la participation aux élections et la gestion loyale des intérêts des capitalistes, il ne reste plus à la direction du PCF qu’à faire la démonstration qu’elle est désormais beaucoup moins sensible à ce qui peut se passer dans la classe ouvrière et plus disposée à prendre ses distances avec sa propre base militante.

Ainsi lorsque la direction du PCF ouvre la discussion préparatoire y compris à ceux qui n’ont pas leur carte d’adhérent, lorsque Robert Hue annonce que les communistes s’ouvrent à la société et au mouvement social, ou encore lorsqu’au dernier comité national, le rapporteur Paul Lespagnol présente un projet de modification des structures de direction et de l’organisation du fonctionnement d’un parti qui ne prétendra plus dorénavant diriger l’activité des militants mais laissera ceux-ci décider eux-mêmes de leurs choix (ce qui en fait est déjà souvent le cas), sous couvert de laisser plus de champ et de liberté aux militants, c’est la direction qui entend bien s’octroyer la liberté complète de mener la politique qu’elle veut.

L’importance et l’aspect « novateur » donnés à la préparation du congrès correspondent à cette volonté de la direction du PCF de poursuivre les changements largement commencés dans le parti, son fonctionnement, et surtout ses rapports au mouvement syndical et à la classe ouvrière.

L’ouverture devient un moyen pour faire avaler la pilule à la base. Elle semble répondre à l’aspiration de nombreux militants à entretenir de meilleurs rapports dans les syndicats, associations ou quartiers avec des militants d’autres courants, y compris de l’extrême gauche, avec l’espoir d’inverser le déclin des effectifs. Mais au sommet du parti cette ouverture, dont la liste « Bouge l’Europe ! » des élections européennes était la préfiguration, se traduit concrètement par une association avec des personnalités et des politiciens qui se situent clairement sur la droite du PCF.

Rassurer les militants

Avant de réussir totalement cette transformation, Hue et les siens doivent cependant encore composer avec une partie des militants qui après avoir avalé beaucoup de couleuvres, traînent les pieds ou critiquent même de plus en plus fortement. Car la participation gouvernementale et le soutien à la politique de Jospin et de la gauche plurielle font à juste titre de nombreux mécontents. Et si la plupart de ceux-ci se taisent ou quittent le parti sans tambours ni trompettes, la colère gronde aussi dans de nombreuses cellules.

Vis-à-vis de ces milliers de militants qui refusent, en partie ou totalement, la politique du parti, Hue doit donner l’impression de prendre en compte les débats qui agitent celui-ci et trouver les formules qui enrobent ses objectifs de façon à les faire accepter par les militants. En clair il doit trouver le moyen de fondre le PCF encore plus complètement dans les rangs de la gauche plurielle tout en se distinguant de ses partenaires du gouvernement.

C’est à cela qu’il s’est employé ces derniers mois. Car toute la politique de Hue qui a consisté à jouer en permanence sur deux registres contradictoires présentés contre toute évidence comme complémentaires (d’un côté la participation gouvernementale et le soutien du PCF à la politique de Jospin et de l’autre l’organisation de manifestations destinées à exprimer les aspirations aux changements et à une autre politique) faisait intégralement partie de la préparation du prochain congrès, au moins autant que les textes laborieusement élaborés dans les prétendus débats de la base.

Marginaliser les oppositions

De nombreux militants confrontés aux méfaits concrets de la politique du gouvernement, perçoivent les contradictions de la politique de leur parti. Cela a poussé les plus déterminés d’entre eux à s’organiser dans plusieurs regroupements semi-publics, à faire part de leurs états d’âme, voire à voter pour l’extrême gauche lors des dernières élections régionales et européennes. Et même quelques dirigeants locaux, voire nationaux, à se ranger dans le camps de militants hostiles à la politique de Hue, ou au moins faire mine de s’en démarquer à l’occasion.

Mais pour le moment c’est à des oppositions bien dispersées que la direction a affaire. D’abord dans un parti qui ne connaît que depuis bien peu la libre discussion des désaccords, dont le cloisonnement a longtemps permis d’éviter les regroupements et qui de plus interdisait la publication de textes alternatifs à ceux de la direction, les débats ne semblent pas si aisés que le prétend Robert Hue. Et les conditions réelles de préparation du congrès ainsi que les « consultations » éclairs soi-disant destinées à recueillir l’avis de la base mais aboutissant finalement à éviter le débat dans les instances de base n’ont peut-être pas amélioré les choses tant que cela.

Mais surtout il n’existe pas de socle commun en terme de perspectives pour les oppositionnels. Entre les militants regroupés dans la Coordination communiste principalement implantée dans le Pas-de-Calais et dont le ciment est la nostalgie d’un PCF stalinien et fier de l’être, ceux de l’appel des 500 à Paris autour de Rolande Perlican membre du Comité national, rassemblés essentiellement sur une critique de la participation au gouvernement depuis 97, et ceux de la Gauche communiste qui proposent une critique du passé stalinien et un retour au parti révolutionnaire du début, les divergences sont grandes. La seule opposition à la politique actuelle de la direction ne peut constituer une base de rapprochement comme l’ont d’ailleurs constaté ces tendances elles-mêmes lorsqu’elles ont essayé de discuter ensemble.

Plus rien n’est tabou aiment à répéter les dirigeants du PCF. Le prochain congrès va peut-être en effet en donner la preuve... bien qu’on ne voit plus très bien quels tabous ses dirigeants ont encore à abattre pour être reconnus comme des politiciens bourgeois à part entière.

Le 8 janvier 2000, Eric PERREUX

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