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La régularisation des sans papiers, une mesure d’urgence

17 août 2006

La semaine dernière, seize Africains sont morts de soif et de faim dans une embarcation qui dérivait au large de la Mauritanie en tentant de rejoindre les Canaries, en territoire espagnol. Depuis le début de l’année, on estime à un millier le nombre de personnes qui ont péri dans les mêmes conditions. La télévision espagnole a montré des images très choquantes de morts noyés retrouvés sur les côtes.

En Afrique, le pauvre des continents pauvres, la misère est telle qu’on est prêt à endurer les pires souffrances et à risquer sa vie pour émigrer. Et face à cette situation, l’Europe ne trouve qu’à renforcer la répression : bientôt les navires espagnols qui patrouillent autour des Canaries seront épaulés par des navires portugais et italiens et un avion finlandais. L’Union européenne c’est bien l’Europe des barbelés !

Et en France l’heure est aussi à la répression contre les immigrés, à la chasse aux sans-papiers pour qui la période estivale est surtout lourde de danger.

On se souvient qu’en novembre dernier, Sarkozy avait annoncé qu’il suspendrait l’exécution des mesures d’éloignement (euphémisme pour arrestation et expulsions) pour les enfants scolarisés et leurs parents jusqu’à la fin de l’année scolaire. C’est que l’opinion avait été émue par les expulsions d’enfants, dénoncées par le Réseau éducation sans frontières (RESF) qui popularisait la cause des enfants sans-papiers et organisait la solidarité des élèves, des profs, des parents et des habitants des quartiers pour empêcher leur expulsion.

L’expulsion d’enfants faisait apparaître toute l’horreur qu’il y a dans chaque expulsion d’immigré. Alors le 13 juin, peu de temps avant les vacances et la fin du sursis accordé et histoire de peaufiner son image de politique rigoureux mais au grand cœur, Sarkozy publiait une circulaire laissant entrevoir des mesures de régularisation. Mais si cela soulageait les angoisses de quelques uns, il était annoncé à l’avance que la mesure ne concernerait que quelques milliers de personnes, à des conditions strictes. La loi Sarkozy sur l’immigration étant mise en discussion au même moment, il était clair que l’heure n’était pas à une solution des problèmes des familles sans-papiers. Au mieux de quelques unes d’entre elles pour donner le change.

Pour parfaire l’opération Sarkozy nommait comme médiateur Arno Klarsfeld, dont le père a échappé aux rafles d’enfants juifs pendant la seconde guerre mondiale. La comparaison avec les arrestations d’enfants sans-papiers qui se profilaient pour l’été, pour être lugubre, s’imposait forcément. Il s’agissait de disqualifier à l’avance les reproches qui auraient pu être fait à l’encontre des agissements de la police.

Quelques 25 000 demandes de régularisation ont été déposées à la date butoir du 11 août. Sarkozy avait depuis le 24 juillet annoncé le chiffre de 6 000 régularisations, avant même que tous les dossiers soient déposés. C’est donc dans le plus grand arbitraire que les préfectures ont commencé à faire le tri. Des familles ont déjà été expulsées comme cette famille ukrainienne de Corbeil-Essonnes, dont le fils de 3 ans, scolarisé, est né en France. Et la plupart de ceux qui ont assez fait confiance à l’administration française pour déposer leur demande resteront sans-papiers et sous la menace d’une expulsion à tout moment.

Certes Sarkozy n’envisage sans doute pas d’expulsions massives, juste quelques unes, histoire de maintenir toutes les autres dans la peur constante. La condition de sans-papiers est en effet du pain béni pour bon nombre de patrons qui usent à l’envie de leur travail. Cela leur offre une main d’œuvre sujette à toute la flexibilité possible, car elle est sous la menace d’être dénoncée à tout moment. Le cas de l’entreprise OSP, basée en Seine Saint-Denis et qui fournit des agents de sécurité à des magasins comme Monoprix est révélateur : huit salariés maliens, embauchés en 2003, ont été licenciés en mai, après que leur employeur a « découvert », au moment qui l’arrangeait, que ses salariés étaient des sans-papiers.

Les expulsions qui ont ponctué cet été de jeunes scolarisés, de familles avec des jeunes enfants, dénoncées par les associations, en particulier RESF, provoquent une nouvelle réaction de dégoût vis-à-vis de Sarkozy et sa démagogie. Et la lutte contre l’expulsion des enfants scolarisés et de leurs parents pourrait déboucher sur la remise en question de la situation de tous les sans-papiers. La manifestation du samedi 26 août, sera une occasion de réaffirmer notre exigence de la régularisation globale de tous.

Laurent VASSIER

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