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La Palestine au bord de la guerre civile ?

21 décembre 2006

Ces derniers jours les affrontements meurtriers se sont multipliés entre les troupes du Hamas et celles du Fatah, aggravant le chaos qui règne en Palestine et tout particulièrement à Gaza. La proposition de nouvelles élections par le président Mahmoud Abbas n’a fait qu’exacerber le conflit entre les deux partis. Et tous, gouvernements et politiciens, américains, européens, israéliens, de gauche comme de droite, de s’inquiéter, regretter ou déplorer qu’on soit là-bas au bord de la guerre civile.

Les hypocrites ! Tous, sans exception, ont aidé à créer un chaos et une situation insoutenable qui pousse à la guerre intestine. Tous travaillent depuis un an à se débarrasser du gouvernement islamiste du Hamas, pourtant issu d’élections démocratiques qu’ils prétendaient appeler de leurs vœux. Tous ont consciemment tout fait pour préparer cette guerre civile qu’ils feignent de craindre aujourd’hui.

Depuis des mois les attaques armées israéliennes n’ont pas cessé avec l’approbation ou au moins le silence des Occidentaux. La dernière grande offensive militaire sur Gaza, qui s’est soldée par une dizaine de morts et de nombreuses destructions, ne date que d’un mois. Et quand ce n’est pas l’armée ce sont les colons israéliens eux-mêmes qui s’en prennent aux Palestiniens. Ainsi à Farata en Cisjordanie, le 25octobre, où des paysans qui s’apprêtaient à y récolter leurs olives, ont été attaqués par des colons, et où les soldats israéliens, qui s’étaient éloignés avant l’attaque, sont revenus... pour arrêter plusieurs Palestiniens. Car pour les colons comme pour l’armée israélienne c’est l’impunité. La Cour suprême israélienne vient même de déclarer que les « assassinats ciblés » (si ce n’est pas du terrorisme, ça !) de militants palestiniens par l’armée israélienne étaient légaux, à condition... que la personne visée soit bien la bonne ! Précision qui devrait faire passer ces « juges suprêmes » israéliens pour des juristes fous et qui ne garde un sens que lorsqu’on sait que, depuis septembre 2000, les morts « civils » (c’est-à-dire par hasard) sont au nombre de 129 sur les 339victimes des « assassinats ciblés » de Tsahal.

Toujours avec la complicité américaine et européenne, Israël asphyxie économiquement les territoires palestiniens, ajoutant à une situation sociale déjà explosive. Depuis le retrait d’Israël, en 2005, la bande de Gaza subit un véritable siège. Tous les points de passages sont bloqués. L’entrée des quelques Palestiniens qui avaient pu trouver du travail en Israël est entravée aux postes de contrôle. Et, 4% seulement des produits agricoles destinés à l’exportation ont pu quitter la bande de Gaza. Ainsi toute l’activité économique est étouffée et le chômage s’est aggravé, passant de plus de 30 à plus de 40% en un an

Et c’est l’Europe qui porte le coup de grâce à la paix civile en versant ses aides directement aux services du président, c’est-à-dire au Fatah, et non plus au gouvernement du Hamas. Histoire d’assurer l’étranglement de la Palestine qu’a programmé Israël en gardant, en toute illégalité internationale, le produit de la taxe douanière qui devrait revenir au gouvernement palestinien et qui représente près de la moitié du budget de celui-ci.

Si une guerre civile devait éclater, Israël et les États impérialistes qui le soutiennent en seraient bien les principaux fauteurs. Preuve, les politiciens de tous bords qui défilent au Proche-Orient pour féliciter les dirigeants israéliens et maintenant ceux du Fatah : Tony Blair qui, en Cisjordanie ce lundi, a approuvé Abbas et l’annonce de nouvelles élections... qui risque d’être celle de cette guerre civile ; ou Ségolène Royal qui, il y a deux semaines, dûment chapitrée par la diplomatie française après sa rencontre avec un député du Hezbollah, a refusé de rencontrer le Hamas pour apporter son appui, elle aussi, à Abbas et aux « efforts de paix »israéliens.

Après avoir désorganisé l’économie palestinienne et exacerbé les tensions, les dirigeants occidentaux poussent donc ouvertement le Fatah à l’affrontement avec le Hamas. Bien sûr, ce dernier ne représente pas une perspective pour la population palestinienne comme l’a montré une année d’un gouvernement dont la politique faite de clientélisme, d’obscurantisme religieux et de démagogie anti-israélienne n’est au fond pas si éloignée de celle de son prédécesseur et rival. Mais ceux qui poussent à l’affrontement entre Palestiniens cherchent moins à éliminer l’organisation islamiste (faut-il rappeler qu’Israël l’avait d’abord appuyée... contre le Fatah !) qu’à affaiblir encore la cause palestinienne et renforcer ainsi l’État hébreu, leur pion dans la région.

Maurice SPIRZ

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