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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 42, novembre-décembre 2005

Épinay-sur-Seine (93) : Échec à l’expulsion d’un élève sans papiers

Mis en ligne le 10 novembre 2005 Convergences Politique

Dans le lycée Jacques-Feyder à Épinay-sur-Seine (93), en octobre 2004, à l’initiative de militants d’extrême gauche était convoquée une première réunion, qui a rassemblé environ 40 personnes, dans le but de monter un collectif de défense des élèves sans papiers, collectif s’inscrivant dans le cadre du Réseau éducation sans frontières (RESF) qui venait de se créer.

Tous ont signé un texte demandant la régularisation de ces élèves. Ils ont commencé par prendre en charge le cas de deux élèves. Des membres du RESF leur ont expliqué comment monter les premiers dossiers. A suivi sur le lycée une diffusion d’un premier tract, signé par une vingtaine d’adultes (profs, surveillants, infirmière, CPE, assistante sociale). Le but était d’annoncer aux élèves l’existence d’un collectif et aussi de montrer à la direction du lycée que le collectif mobilisait bien plus que deux ou trois personnes. Cette diffusion a été réitérée trois ou quatre fois et de nouveaux cas d’élèves sans papiers ont été signalés. Chaque dossier a alors été pris en charge par un membre du collectif.

En février 2005, un premier rassemblement a été organisé devant la Préfecture de Bobigny. 150 personnes de RESF 93, dont 6 seulement du lycée Feyder : déception ! En avril, lors d’un nouveau rassemblement, une délégation du Réseau déposait quelques dossiers à la Préfecture. En juillet, à Paris cette fois, se retrouvaient 20 personnes du collectif : adultes et élèves, venus soutenir les élèves sans papiers. Au final, le collectif avait obtenu sur l’année quatre autorisations provisoires de séjour, expirant au bout de trois mois. C’était peu, ça avait été long, mais il était donc quand même possible de faire quelque chose.

Le choc

Puis il y a eu le choc de la rentrée : Guy, élève de terminale, qui venait de rater son bac, était en centre de rétention, arrêté depuis le 17 août. Des membres du collectif présents à Paris fin août ont été lui rendre visite à Roissy. Lors de la réunion de pré-rentrée, une CPE a pris la parole pour faire connaître le cas de Guy. Un affichage a été fait en salle des profs et les membres du collectif en ont parlé autour d’eux et, avec le Réseau 93, ont fait une demande d’audience à la Préfecture. Une pétition a alors été lancée au lycée, les élèves impliqués dans le collectif ont fait un travail énorme, revenant avec 400 signatures en un jour. Des délégations profs-élèves se sont rendues au tribunal de Meaux et à la Cour d’Appel de Paris où Guy devait être jugé.

Sans réponse de la Préfecture, le collectif a décidé de donner rendez-vous devant le lycée afin de se rendre en manifestation à la Préfecture. Seules 15 personnes étaient présentes et la manif a dû être annulée. Les militants du collectif étaient très démoralisés. Le soir, à une réunion de RESF 93 a été lancée l’idée d’aller s’adresser aux passagers à Roissy car on savait que Guy devait être expulsé avant le lundi. Le jeudi, une heure d’information syndicale a rassemblé 60 personnes au lycée, tous émus par l’imminence de l’expulsion. Le collectif a proposé une heure de débrayage le lendemain vendredi, votée à la quasi-unanimité. De leur côté une dizaine d’élèves ont fait le tour des classes pour tout arrêter vendredi matin. De fait à 7 h 10, une centaine d’élèves bloquaient déjà le lycée. Ils avaient apporté tout le matériel nécessaire, matelas, planches, panneaux de signalisation et la banderole « libérez Guy ». L’expérience du mouvement lycéen des six mois précédents leur a permis de vite s’organiser. Il n’y a pas eu cours de la journée, France 3, présente s’en est fait l’écho à midi et lors du 19-20.

Une libération en effet « exceptionnelle »

Samedi, 100 personnes se sont rendues au centre de rétention du Mesnil-Amelot, parmi elles 30 du lycée, d’autres du MRAP, de la LDH, de Sud, de SOS-Racisme... Elles étaient encore là le dimanche, toujours accompagnées des médias. On a appris que l’avion allait partir à 23 h 30 le dimanche soir. Des dizaines des profs et élèves du lycée ont été appelés pour diffuser un tract avec la photo de Guy aux passagers. Accompagnés de la LDH, Sud, Mrap, SOS-Racisme et en présence du Parisien, France 2, France 3 et France-Inter. Les CRS ont gazé tout le monde, manifestants et passagers... Indignation. Et l’avion n’est pas parti, parce que les passagers ont refusé d’embarquer et le commandant de décoller. Le lendemain, au lycée, la grève a continué. 250 lycéens et 40 profs se sont rendus au tribunal pour exiger la libération de Guy. Le procès a été reporté à mardi. Mardi la colère était intacte. Le lycée était toujours en grève (votée à l’unanimité). Les élèves ont fait le tour d’autres lycées du 93. 600 élèves et 50 profs se sont rendus au tribunal pour apprendre que Sarkozy libérait et régularisait Guy à titre « exceptionnel » et pour raison humanitaire !

Tous au lycée sont bien conscients que ce n’est que grâce à la mobilisation des élèves et des enseignants que Guy a pu revenir au lycée. C’est une première victoire qui a encouragé d’autres mobilisations. Ainsi une famille a-t-elle été libérée à la suite de la mobilisation des écoles primaires de Pantin et, le lundi 17 octobre, 150 élèves du lycée Delacroix de Drancy se sont rassemblés devant la Préfecture de Bobigny pour obtenir la libération et régularisation d’une mère de famille.

25 octobre 2005

Stéphane BESSON

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