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DOSSIER : L’Inde : nouveau « miracle » de l’économie capitaliste ?

Du « socialisme » à l’ouverture au marché mondial

Mis en ligne le 10 mai 2007 Convergences Monde

L’Inde de Nehru, à l’issue de l’indépendance en 1947, était un pays surtout agricole et textile. Son gouvernement avait fait alors le choix de se doter d’une industrie lourde par des investissements étatiques massifs et de se protéger de la concurrence par un fort protectionnisme, comme l’avait fait la Russie stalinienne. Certains secteurs d’investissement étaient quasiment fermés aux capitaux étrangers. Mais les industriels nationaux bénéficiaient, des faveurs du pouvoir, des aides de l’État et de ce protectionnisme, même si les objectifs des plans quinquennaux furent présentés comme « un développement de type socialiste, afin d’assurer une croissance économique rapide, l’expansion de l’emploi, la réduction des inégalités de revenus et de richesse », comme l’affirmait le Préambule au deuxième plan. Le « type socialiste de société » selon une expression de Nehru, ne faisait référence qu’à l’étatisme, au dirigisme économique, à la planification de grands ouvrages et de l’industrie lourde, et aux liens économiques avec la Russie stalinienne.

En réalité l’Inde n’a jamais eu une économie d’État comparable à celle des pays de l’Est, mais une économie mixte faisant la part belle à une grande bourgeoisie très assistée. Pendant quarante ans l’État indien a investi à perte dans l’économie, sans avoir accès au marché mondial monopolisé par les pays riches.

C’est au milieu des années 1980 et au début des années 1990 que la politique d’ouverture de l’économie mondiale voulue par l’impérialisme, a permis à l’Inde de renoncer à sa politique économique autarcique. C’est l’époque du partenariat entre le groupe automobile japonais Suzuki et l’indien Maruti et d’un contrat avec Alcatel. Le pouvoir indien a alors réorienté toute sa politique économique pour favoriser l’industrie et le commerce privés, désengager l’État par des privatisations, aider les exportations et permettre les investissements étrangers. Des zones franches industrielles exclusivement tournées vers les marchés extérieurs ont été créées et des activités d’exportations défiscalisées. L’État a particulièrement aidé le secteur privé de l’informatique, de loin le plus important des secteurs d’exportations.

Fin de l’étatisme

En 1991, l’abolition du Licence Raj (autorisation d’investir) sonne la fin de l’économie contrôlée par l’État. Les industriels indiens redeviennent totalement libres de leurs choix d’investissements à l’intérieur et à l’extérieur du pays et les investisseurs étrangers libres d’entrer dans le pays. Libéralisation commerciale, baisse des droits de douane, démantèlement des restrictions quantitatives, début des privatisations et diminution des moyens donnés au plan vont offrir un appel d’air au capital privé, national comme étranger. La croissance dépasse 7 % chaque année entre 1994 et 1997.

Ce dynamisme et cette confiance des marchés financiers dans les perspectives nouvelles du pays lui permettent d’échapper en grande partie à la « crise asiatique » de 1997. De 1998 à 2007, les privatisations, pudiquement appelées « désinvestissements » (compte tenu d’une forte opposition dans la population) se multiplient. Le secteur privé indien, étranger ou mixte, devient de plus en plus important. Les exportations de biens et services croissent au rythme de 10,8 %. En 2005, la hausse des profits a atteint un niveau record de 40 % selon un auteur qui s’adresse aux investisseurs  [1] . L’Inde rembourse désormais ses prêts par anticipation et n’est plus cataloguée comme un pays sous-développé.

Dans le même temps, l’Inde voit croître son marché intérieur. Selon Jean-Joseph Boillot, dans L’économie de l’Inde [2] : « L’Inde entre progressivement dans l’ère de la consommation de masse pour les classes moyennes avec une expansion de la consommation privée voisine de 5 % par an et une contribution à la croissance du PIB proche de 65 %. » Sur une population qui a franchi le cap du milliard en 2000, la classe moyenne représente 250 millions d’habitants alors que 840 millions d’Indiens sont encore au dessous du seuil de pauvreté selon le rapport du PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) de 2004. Car l’essor du capitalisme n’y supprime pas la misère et l’arriération des conditions de vie : 65 à 70 % de la population vivent à la campagne, 92 % de la population active travaille dans le secteur informel. 27 millions sont au chômage plus 35 millions en sous-emploi, selon le rapport de la commission du plan de 2002.

Avec le Mexique et le Brésil, l’Inde fait partie des sociétés les plus inégalitaires du monde.

Robert PARIS


[1L’Inde, l’avènement d’une grande puissance, de Bertrand Schneider, éd. Organisation, mai 2006.

[2Éditions La Découverte, mars 2006.

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