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DOSSIER : 1968-2008 : 40 ans de prolétarisation de la société et de luttes de classe

Des chiffres et des luttes

Mis en ligne le 13 mai 2008 Convergences Politique

Ces 20 à 30 dernières années, la classe ouvrière n’a pas trouvé la force de stopper l’offensive de la bourgeoisie contre l’emploi et les salaires. La situation sociale, comme le reflet qu’en donnent les statistiques du ministère du Travail, n’indiquent pourtant aucun électroencéphalogramme plat.

Les syndicats ont du mal à recruter. Dans les années 1980, leurs effectifs ont dégringolé de 20 % des salariés aux 7 à 8 % d’aujourd’hui. La France est classée au dernier rang de l’Europe à 25 pour son taux de syndicalisation [1]. Pourtant, si les équipes militantes ont fondu, plus de la moitié des salariés disent avoir un syndicat dans leur entreprise et la France est 10e pays européen pour cette étendue. D’après la Dares (la direction statistique du ministère du Travail), en 2006, les syndicats sont intervenus dans le déclenchement de 74 % des conflits collectifs (43 % impliquant la CGT, loin devant les autres syndicats), qu’ils les aient souhaités ou simplement appuyés. En France, l’adhésion à un syndicat, en particulier dans le secteur privé, reste un signe d’attachement à quelques perspectives de lutte [2]. Et les syndicats gardent des capacités d’action… même si celles-ci consistent finalement moins à encourager aux combats nécessaires qu’à signer des accords dommageables pour les travailleurs.

Des causeries de salon en courbe ascendante

Gouvernements et patronat n’ont pas ménagé leurs efforts pour circonvenir les appareils syndicaux en espérant limiter et désarmer les luttes. En 1982, la loi Auroux instaure les accords d’entreprise dérogatoires aux accords de branche sur les salaires, permettant aux patrons d’obtenir un rapport de force plus favorable contre les travailleurs isolés dans leur entreprise. Entre 1983 et 1990, le nombre d’accords d’entreprise passe de 1 955 à 6 496 par an. Puis, sous l’effet des 35 heures, il monte à plus de 19 000 dans l’année 2003, avec des pointes à 35 000 et 30 000 en 2000 et 2001.

Les directions syndicales se sont empressées de jouer au « dialogue social ». Sarkozy leur en fournit en veux-tu, en voilà ! Au point que certaines se plaignent du rythme soutenu des sollicitations les impliquant dans les reculs sociaux.

Cela n’empêche pas les employeurs de jouer davantage du bâton. Ils ont eu recours aux sanctions contre la contestation sociale dans 72 % des sites entre 2002 et 2004, pour 66 % entre 1996 et 1998.

Des grèves en courbe descendante

Côté luttes, les chiffres de l’Inspection du Travail sur les grèves du secteur privé montrent qu’elles ont décliné depuis la fin des années 1970 (bien qu’une large part ne lui soit pas signalée et échappe au recensement). Dans ce secteur, le nombre annuel de jours de grève recensés a été divisé par cinq depuis la fin des années 1970. La crainte du chômage et la multiplication des statuts précaires pèsent beaucoup, mais aussi l’absence de perspective et la déception des gouvernements de gauche auxquels se sont associés les syndicats. Néanmoins, les salaires restent le motif de « retours de flammes » grévistes cycliques : 1986-1989, printemps 1995... et plus récemment depuis 2004.

Dans la fonction publique, les grèves n’ont pas diminué autant. Des conflits d’ampleur éclatent même régulièrement : cheminots en 1986 et 2007, infirmières en 1988, impôts en 1989 et 2000, profs en 1999 et 2003 et cheminots, profs, postiers et d’autres ensemble en 1995. Le service public est concerné par plus de 60 % des grèves, alors qu’il ne représente que 20 % des salariés. Pas tant qu’il soit plus attaqué, mais il reste à ce jour plus protégé et en situation de réagir sans craindre autant pour son emploi.

Colère et contestation bien visibles

Dans ce contexte de faible mobilisation, des coups de colères éclatent, même dans le privé. On a régulièrement vu la situation sociale se tendre ces dernières années, obligeant les syndicats à lâcher de la vapeur à coups de journées d’action. À la rentrée 2005, la grève de la SNCM, suivie par celle de la RTM, a peu pesé dans les statistiques. Pourtant, elle avait créé une certaine ambiance. En 2006, avec le mouvement contre le CPE, 3 millions de travailleurs et étudiants ont manifesté pour faire reculer le gouvernement, sans que cela compte dans les chiffres de grève.

Comparant les périodes 1996-1998 et 2002-2004, la Dares a remarqué [3] que les petits conflits sont plus nombreux : pétitions, débrayages, refus d’heures supplémentaires, manifestations. Principalement sur les salaires et le temps de travail.

Mathieu PARANT


[1«  Le Paradoxe du syndicalisme français  », Dares, Premières Synthèses n°16.1, avril 2008.

[2Selon la Dares, 48 % des salariés syndiqués déclarent participer aux arrêts de travail et 48 % aux autres formes de lutte, contre respectivement 12 et 14 % des non syndiqués.

[3 La négociation collective 2006 , partie n°3, dossier n°4 : « Les conflits collectifs du travail dans les entreprises au cours de la dernière décennie », 26 juin 2007.

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