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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 87, mai 2013

Dans l’Allier, les Candia, DMI, JPM et tous les autres : Le difficile combat des moyennes et petites boîtes condamnées à fermer

Mis en ligne le 30 avril 2013 Convergences Entreprises

« Une prime de 85 000 € en plus des indemnités légales ! Nous sommes enviés par tous ceux qui dans ce département ont été licenciés ou sont menacés de l’être », reconnaît Eddy Lamartine, délégué syndical CGT de JPM et porte-parole de l’intersyndicale qui a mené une grève de deux semaines dans cette usine de serrurerie d’Avermes, près de Moulins, 160 salariés.

À la lecture de la liste des entreprises du département de l’Allier qui ont fermé ou menacent de fermer en ce seul premier trimestre 2013 et des conditions dans lesquelles elles ferment, on peut comprendre cette « envie » : DMI, une fonderie à Vaux près de Montluçon, 160 salariés ; Candia, une laiterie de Saint-Yorre, une centaine de salariés… Mais aussi une myriade de plus petites encore, liquidées du jour au lendemain et parfois sans avertissement, comme à Vichy : Simobi, fabrique de meubles, ou Capryl, desserts et boissons, dont le slogan était « la gourmandise n’est pas un péché ». La gourmandise sans doute, mais le capitalisme !

Mais que peut-on dire ou faire quand on est dans une entreprise d’une vingtaine de salariés ? C’est en tout cas le sentiment des ouvriers et ouvrières. Alors réclamer 85 000 euros en plus des indemnités légales… Merci, messieurs les patrons (petits ou grands) voyous !

Prime de licenciement de 85 000 euros…

Pourtant Eddy n’est pas satisfait. Lui entendait se battre contre la fermeture de la boîte tout simplement. Et même pour une loi interdisant les licenciements boursiers. Et, avec lui, une bonne partie des travailleurs de JPM dont un quart se sont prononcés contre l’accord de fin de grève. Car celui-ci a entériné cette prime mais aussi la fermeture de l’usine et le déménagement des salariés à des centaines de kilomètres, en Champagne ou dans l’ouest, l’éventualité qui est le cauchemar de tous.

En fait, la situation de JPM-Moulins n’était pas mauvaise, une entreprise qui croule sous le travail et a augmenté ses profits de 14 % en 2011. La fermeture ne s’explique que par la volonté du groupe Assa-Abloy, auquel appartient JPM, de profiter de la « crise » pour réorganiser et augmenter encore la rentabilité. Assa-Abloy représente un chiffre d’affaires de plus de 4 milliards d’euros, emploie plus de 42 000 personnes dans plus de 100 sociétés dans le monde et 60 sites en Europe de l’ouest, dont 30 sont appelés à disparaître. C’est à cette condition qu’Assa-Abloy espère atteindre un taux de rentabilité de 22 % en 2015. Vrai ou faux calcul ? Eddy et ses camarades estiment que le groupe va dépenser plus de 20 millions pour la fermeture de l’usine de Moulins et la réorganisation qui suit, pour 0,5 million d’économies attendues selon la direction elle-même !

Peu importe d’ailleurs ! L’important c’est que la vie de dizaines de travailleurs et de leur famille va être chamboulée, voire dévastée. Aussi y a-t-il un peu d’amertume chez Eddy quand il reconnaît qu’il n’y a eu en effet aucune tentative sérieuse de ceux de Moulins pour s’organiser avec les autres sites Abloy, où les conditions de travail vont inévitablement se durcir du fait de la fermeture de JPM Moulins. Et pas plus avec les autres entreprises du département, sauf à se côtoyer dans des manifs sans lendemain.

…ou des clopinettes

Pas de grand groupe derrière DMI. La fonderie, passée de 800 travailleurs à 160, a finalement été carrément abandonnée par le fonds de pension, son dernier repreneur, dont on se demande encore quelle opération il a tenté en la rachetant. Et celui accepté par le tribunal de Montluçon lors de la liquidation judiciaire n’a rembauché qu’une trentaine de personnes. 135 sont donc sur le carreau, et pas question pour elles d’une prime extralégale.

Pourtant, les salariés de DMI ne se sont pas laissés étrangler sans réagir. Constatant que manifestations dans Moulins, barrages de routes et occupation des voies de chemins de fer, ni même deux mois d’arrêt du travail, ne les tiraient pas de l’anonymat ni de l’isolement, ils ont menacé de faire sauter l’usine en installant des bonbonnes de gaz à l’entrée. Effectivement l’effet médiatique a été immédiat et retentissant. Mais il n’a pas permis de sauver DMI ni même d’assurer les contacts avec d’autres boîtes. Une tentative en direction de PSA Aulnay ayant été trop tardive et d’ailleurs quelque peu décevante.

«  Nous avons fait tout ce que nous pouvions », dit Gaby Gawin, délégué syndical CFTC et principal inspirateur des tentatives pour sortir de l’isolement. « Au moins je n’ai pas de regret » Sauf sans doute celui de n’avoir pas réussi, pour être resté trop longtemps replié sur ses seules forces.

La vraie question est de s’opposer aux licenciements et fermetures

Candia est une « coopérative » agro-alimentaire qui emploie 1 400 salariés répartis dans huit usines à travers le pays. La société fait partie d’un groupe coopératif, Sodiaal, qui emploie lui-même 7 000 salariés, tout aussi dispersés. Le statut de coopérative permet aux dirigeants de Sodiaal de prétendre que le groupe ne cherche et ne fait aucun profit. Il ne l’empêche pourtant pas de fonctionner suivant les lois du capitalisme, de rationaliser structures et production et, en ce moment, de se proposer de fermer trois usines Candia, à Saint-Yorre mais aussi au Lude (Sarthe) et à Villefranche-sur-Saône, totalisant 300 salariés. D’un autre côté vient d’être annoncée une « association » avec plusieurs autres sociétés coopératives agroalimentaires dont Coralis et ses 300 salariés bretons. Une « association » qui promet de nouvelles rationalisations, licenciements et peut-être fermetures chez Sodiaal comme Coralis.

L’usine Candia de Saint-Yorre n’est pas encore fermée. Ses salariés, après une grève de deux semaines, ont « retenu » pendant quelques heures leur nouveau Directeur général. Et, mardi 23 avril, ils se rendent auprès du TGI de Paris qui doit se prononcer sur le PSE proposé. Ils espèrent y faire la jonction avec leurs camarades de la Sarthe… et même des représentants de boîtes de la région parisienne emblématiques du combat contre les fermetures comme PSA.

Car, si le statut de coopérative ne fait plus illusion pour les salariés, comme l’explique le secrétaire du CE, Thierry Rebillard, il y a d’autres obstacles à surmonter. En particulier, leur dispersion en petits établissements sur tout le territoire sans vrais contacts entre eux jusqu’ici, autrement que par une fédération CFDT bien absente aujourd’hui.

21 avril 2013, J.M.

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