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Argentine : La bureaucratie syndicale au secours des petits barons du rail

Mis en ligne le 25 mars 2012 Convergences Monde

Si Omar Maturano, dirigeant de la « Fraternidad », le syndicat des conducteurs, a pris la défense de son jeune collègue, il s’est bien gardé de reprendre à son compte le mot d’ordre qui fait pourtant désormais l’unanimité parmi les cheminots comme parmi les usagers et la majorité de la population : « Fuera TBA ! » Il n’a pas eu un mot de critique contre son patron et s’est contenté de revendiquer des investissements de l’État plus importants, autrement dit de nouvelles subventions qu’empocherait la compagnie privée, sans contrôle. Maturano a même osé dire que les travailleurs faisaient partie des responsables de la catastrophe. De son côté, Fernandez, dirigeant intérimaire de l’Union ferroviaire, en l’absence de son secrétaire général José Pedraza, incarcéré, s’est surtout efforcé de calmer le jeu en répétant qu’il fallait attendre les résultats de l’enquête et qu’un mouvement de cheminots serait malvenu en raison… de la préparation d’une journée nationale d’action contre la vie chère. Quant au dirigeant national de la CGT, Hugo Moyano, on ne l’a pas entendu du tout…

En Argentine, la bureaucratie syndicale argentine a en effet donné naissance depuis fort longtemps à une véritable mafia. Certains de ces bureaucrates portent la double casquette d’affairiste et de dirigeant syndical, tel ce Pedraza inculpé suite au meurtre d’un militant du Partido Obrero, surnommé « le roi des trains », passé du PC stalinien argentin dans les années soixante au péronisme. Pedraza, tout en aidant le gouvernement Menem à supprimer près de 85 000 emplois de cheminots, a largement puisé dans les caisses du syndicat et s’est lancé dans les affaires. Son propre fils gère une « coopérative » de cheminots, qui n’est rien d’autre qu’une façade pour exploiter des précaires. Comme Moyano, il est connu pour mener grand train et côtoyer les patrons dans les lieux de vacances les plus huppés.

Des affaires au crime

Ces bureaucrates mafieux ne reculent devant aucun moyen. Le 20 octobre 2010, des hommes de main de l’Union Ferroviaire réprimaient violemment une manifestation de cheminots précaires, blessant grièvement plusieurs personnes et tuant Mariano Ferreyra, un militant de 23 ans du Partido Obrero (trotskyste). Les précaires devaient néanmoins obtenir gain de cause et réussir à imposer un statut et, à la suite de manifestations monstres, la justice se décidait à inculper et incarcérer José Pedraza, qui avait commandité cette agression. Mais celui-ci, de sa cellule, continue à gérer ses affaires : il est parvenu à se faire réélire à la tête de l’UF et à organiser une grève pour revendiquer sa libération !

Bien entendu, cette bureaucratie syndicale est étroitement liée à l’appareil d’État et soutenue par lui depuis la dictature de Perón.

La bête noire des patrons de TBA

Il existe pourtant en Argentine, où 40 % des salariés sont officiellement syndiqués, toutes sortes d’organisations syndicales parfois très combatives, aussi bien parmi les petits syndicats corporatistes indépendants que dans la CTA (Centrale des travailleurs argentins issue d’une scission de la CGT) et même au sein de la CGT. Ainsi, la section CGT des cheminots de la ligne Sarmiento, celle sur laquelle s’est produite la catastrophe de la station 11, a élu à sa tête Ruben Sobrero, ancien militant du MAS (Le Mouvement vers le socialisme), qui ne dissimule pas ses sympathies d’extrême gauche, contre le candidat officiel désigné par Pedraza. Sobrero est ainsi devenu la bête noire du dirigeant de l’Union Ferroviaire comme des patrons de TBA. Ceux-ci ont même essayé de le faire emprisonner et condamner, sous l’accusation de sabotage, après un incendie de train. La solidarité de ses collègues a permis de le faire rapidement libérer et la justice a dû abandonner ces accusations devant l’absence évidente du moindre élément à charge. Néanmoins, ces événements ont permis aux médias de mener campagne contre les cheminots, pour essayer de détourner contre eux la colère des usagers contre les retards et les conditions de voyage. Ces campagnes ont malheureusement un certain écho : quand Sobrero a tenté de prendre la parole dans la station 11, il s’est fait huer lui aussi…

En dépit de ces obstacles, la mobilisation se poursuit. Le 2 mars, une manifestation organisée par la CTA, à laquelle se sont jointes plusieurs sections syndicales de cheminots, dont celle de la ligne Sarmiento, des associations d’usagers et les organisations d’extrême gauche, a réuni une dizaine de milliers de personnes Place de Mai. Cette fois, Ruben Sobrero a été acclamé quand il a revendiqué « L’expropriation de TBA sous le contrôle des travailleurs et des usagers ».

G.R.

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