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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 92, mars 2014

Airbus Group : nouveau nom, nouvelles attaques

Mis en ligne le 8 mars 2014 Convergences Entreprises

Le groupe EADS, dont l’actionnariat vient d’être bouleversé (avec un départ de Lagardère et Daimler, les poches bien pleines), est depuis le 1er janvier 2014 devenu « Airbus Group », avec une réorganisation des divisions. Mais l’essentiel pour les travailleurs est que cette réorganisation s’accompagne de l’annonce de 5 800 suppressions d’emplois : 509 au siège et le reste dans la nouvelle division « Defence & Space » qui va regrouper Astrium (satellites et lanceurs), Cassidian (Eurofighter, missiles...) et Airbus Military (A400M et autres avions de transport militaire).

À Toulouse, une mobilisation exceptionnelle...

À Astrium Toulouse (396 suppressions de postes prévues sur 2 400), où il y a 80 % de cadres, l’incompréhension (« comment comptent-ils augmenter les profits si on n’a plus les moyens de tenir les délais ? ») s’est transformée en mobilisation : l’AG du personnel du 31 janvier a imposé à l’intersyndicale de ne pas attendre le 11 février pour une action.

Le 6 février, donc, une manifestation s’est rendue devant le siège du groupe à Blagnac : 1 700 personnes selon la presse. Si les Astrium étaient les plus nombreux (20 cars n’avaient pas suffi pour les transporter), il y avait aussi d’autres travailleurs menacés : ceux du siège du groupe (509 emplois sur la sellette, par externalisation ou par suppression pure et simple), de Test & Services (une filiale en lutte depuis des mois contre une vente), mais aussi des sous-traitants Altran (600 des 800 travailleurs en mission à Airbus voient leur emploi menacé en 2014), AKKA, ATOS ou de Spot Image (victimes eux-aussi de suppressions de postes malgré la situation florissante de l’entreprise) et des délégations syndicales d’Airbus.

Pour beaucoup de participants, c’était leur première manif depuis des années. Sa réussite leur a donné envie de passer à la vitesse supérieure. Certains parlaient de grève illimitée.

… bloquée par les syndicats majoritaires

Mais force est de constater que l’intersyndicale dominée par la CGC, qui a été reçue par le directeur de l’entreprise, n’a même pas fait (15 jours après la manifestation du 6 février) de compte-rendu écrit de cette rencontre. La direction s’y était contentée de propos lénifiants, comme quoi rien n’était encore vraiment décidé... Pas de tracts syndicaux non plus. Il aura fallu attendre le mardi 18 février pour que la CGT organise une votation dans les restaurants sur la suite à donner.

En fait la CGC, FO et la CFTC avaient dès le départ annoncé que, contrairement à l’opinion de beaucoup de travailleurs qui rejettent l’idée même d’accepter la moindre suppression de poste, ils allaient négocier un PSE (si mal nommé « Plan de sauvegarde de l’emploi »). La CGT et la CFDT, minoritaires aux élections professionnelles, étaient sur la ligne du refus. Et la CGC, dont la stratégie a été contestée par la dernière AG, ne veut plus en convoquer d’autre. Or, au nom du maintien de l’unité syndicale, la CGT a tergiversé malgré les nombreuses interpellations des syndicalistes par les travailleurs outrés de l’inaction des appareils.

À noter que non loin de Paris, aux Mureaux, sur l’autre grand site d’Astrium, un tract intersyndical (hors CGT) titré « Dédramatisons » est sorti, appelant à éviter les actions « violentes ».

Préserver une unité syndicale de façade ou donner des perspectives ?

Vendredi 21 février, la CGT n’avait pas encore communiqué le résultat de sa votation du mardi. Il est pourtant probable qu’une grande majorité du personnel ait voté pour une AG au plus vite et se soit prononcée pour une nouvelle journée de grève. Mais il semble que les responsables CGT, malgré l’attitude radicale qu’ils affichent dans les discussions individuelles, restent paralysés par le mythe de « l’unité syndicale ». Ceci alors même que l’arrivée des vacances scolaires à partir du 28 février imposait au minimum une action forte avant cette date.

Souhaitons que, face à l’attentisme des syndicats, des travailleurs se regroupent pour peser sur la situation.

21 février 2014, Félix RODIN


Grosses craintes dans la sous-traitance informatique

La direction d’Airbus a décidé de réduire l’activité du Bureau d’Études d’Airbus (plus de nouveau projet d’avion) afin d’engranger mieux les profits, ce qui se traduit dans un premier temps par des milliers de suppressions d’emplois chez les sous-traitants en ingénierie. Comme ces sous-traitants forment toute une pyramide, ces suppressions vont s’étaler dans le temps car chaque niveau essaie de sauvegarder son plan de charge en rapatriant les travaux qu’il sous-traitait. Mais, à terme, les suppressions pourraient être de l’ordre de 3 000 dans la région Midi-Pyrénées.

Et ce d’autant plus que Thalès Alenia Space, filiale satellites commune de Thalès et Alenia, dont le plan de charge se réduit, rapatrie toute sa sous-traitance et annonce 270 suppressions de postes (124 sur Toulouse).

Airbus ne prend pas de gants : c’est bien souvent le vendredi qu’on annonce au travailleur sous-traitant qu’il ne doit pas revenir le lundi. Il est alors mis en « inter-contrat » par son entreprise. Ils sont ainsi des centaines n’ayant plus de travail. Tandis que leurs collègues d’Airbus, avec lesquels ils travaillaient souvent depuis des années, s’arrachent les cheveux car les sous-traitants partent avec des connaissances qu’ils sont souvent seuls à maîtriser !


Une stratégie difficile à justifier devant les travailleurs

Le groupe a-t-il subi des pertes, a-t-il des carnets de commandes vides ? En aucun cas. La branche avions civils (l’ex-Airbus) n’a jamais engrangé autant de commandes en un an, et jamais produit autant d’avions : les commandes correspondent à 9 ans de production. Quant à Eurocopter (devenu Airbus Helicopters), son chiffre d’affaires est passé en six ans de 2 à 6,5 milliards d’euros. À Astrium, les travailleurs surchargés se demandent comment tenir les délais de livraison de satellites ou de lanceurs. En fait, seuls Cassidian et Airbus Military, qui fabriquent du matériel militaire (avions et missiles), sont confrontés à la baisse des budgets de défense des États européens.

Il est certes vrai que les lanceurs Ariane que produit Astrium sont désormais en concurrence avec celui de Space X, une société privée américaine. Mais Space X n’a encore effectué que deux tirs. Par ailleurs, Astrium a un peu de retard dans le développement des nouveaux satellites à propulsion électrique. Cela devrait au contraire, selon les ingénieurs d’Astrium, entraîner un développement de la recherche.

Mais l’essentiel n’est pas là : Tom Enders, le PDG, a clairement indiqué que son seul objectif est de passer de 4 % à 10 % de profits. Il a du mal à expliquer son plan aux travailleurs : il prétend que si cet objectif n’est pas atteint, les investisseurs bouderont les actions Airbus. Ce qui est contredit par la hausse de l’action EADS de 90 % en 2013. Il a prétexté qu’Astrium n’était plus assez compétitif face aux Chinois et aux Américains... alors que, deux jours plus tard, Astrium annonçait une commande de 18 lanceurs Ariane tandis que, côté satellites, le carnet de commandes correspond à dix ans de travail et que beaucoup de travailleurs sont sous pression pour tenir les délais.


Airbus Group s’offre une banque

La stratégie purement financière du groupe est confirmée par le rachat d’une banque allemande afin de créer sa propre banque, comme l’a fait par exemple PSA. La direction prétend que c’est par souci de sécurité face aux crises financières... et pour pouvoir aider ses sous-traitants ! On ne connaît pas le coût du rachat de cette petite banque, mais pas de problème pour payer cash : Airbus Group avait environ 8,3 milliards d’euros de trésorerie fin 2013.

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Numéro 92, mars 2014

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