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Accueil > Convergences révolutionnaires > Numéro 65, septembre-octobre 2009

A lire

Mis en ligne le 4 octobre 2009 Convergences Culture

Mouvement ouvrier


L’insubordination ouvrière dans les années 68. Essai d’histoire politique des usines, de Xavier VIGNA

2007, Presses Universitaires de Rennes, 378 p., 22 €.

Ce livre s’intéresse à la révolte de toute une génération d’ouvriers et d’ouvrières, celle des « années 68 » inaugurées par mai 68 et achevées vers la fin des années 1970, plus qu’aux organisations, et analyse cette « insubordination » non comme une fronde désordonnée, mais comme l’embryon d’une politique autonome des travailleurs.

L’auteur pose sa loupe sur leurs initiatives et leurs aspirations, qui trouvent un aboutissement dans l’auto-organisation des mouvements, dans le comité de grève. Il met en lumière le décalage entre la base contestant aussi bien l’ordre patronal dans l’usine que l’ordre social au-dehors et les dirigeants politiques et syndicaux, qui s’emploient à canaliser la révolte vers les urnes en mai 68, ou à négocier leur intégration dans le jeu institutionnel plutôt qu’à riposter à la crise après 1973.

L’ouvrage est de caractère « universitaire » (une thèse simplifiée), mais très sérieusement documenté, appuyé sur des archives syndicales ou policières variées.

Mathieu PARANT


Guerre froide, grèves rouges. Parti communiste, stalinisme et luttes sociales en France. Les grèves « insurrectionnelles » de 1947-1948, de Robert MENCHERINI

1998, Syllepse, 312 p., 22 €.

Après avoir travaillé sur le PCF entre 1944 et 1947 dans la région de Marseille, Robert Mencherini aborde la grève de 1947-1948. Il montre comment le PCF, dont les ministres viennent d’être expulsés du gouvernement, contribue à déclencher des grèves qu’il avait efficacement combattues, notamment via la CGT, dans la période précédente. Si les militants se dépensent sans compter – nombre d’entre eux « en voulaient » en fait depuis longtemps –, les dirigeants sont partagés entre montrer à la bourgeoisie qu’elle ne contrôle pas la classe ouvrière sans eux, et ne pas trop en faire pour ne pas compromettre un éventuel retour aux affaires.

La conférence de création du Kominform en 1947, en réplique à la guerre froide, change la donne. L’URSS resserre les rangs contre l’impérialisme et Duclos s’y voit reprocher la participation au gouvernement. C’est l’occasion pour Thorez de mettre en musique le virage ordonné par Moscou, pas d’aider la classe ouvrière à riposter. Il sonne d’ailleurs la retraite sans que les travailleurs n’aient obtenu grand-chose.

Alerte, ce livre traite aussi bien de la politique des dirigeants du PCF, de la manière dont elle est relayée par ses cadres que de la façon dont les militants ont vécu un mouvement qui a contribué à donner du PCF l’image d’un parti des luttes.

M.P.


Colonialisme

Nauru, l’île dévastée. Comment la civilisation capitaliste a anéanti le pays le plus riche du monde, de Luc FOLLIET

2009, La Découverte, 151 p., 12 €.

Nauru, c’est 21 km2 et 9 000 habitants, un caillou perdu à 2 500 km de l’Australie. Son histoire est une illustration à échelle réduite de toutes les tares du capitalisme. Colonisée par les Britanniques, occupée puis expulsée par les Japonais entre 1942 et 1945, la population de l’île faillit ne jamais revenir d’exil. Le sous-sol de Nauru regorge en effet de phosphate, un « or blanc » dont les Nauruans n’ont jamais eu le contrôle.

À l’indépendance se met en place un système clientéliste. Les royalties du phosphate arrosent des dirigeants corrompus, issus de la chefferie traditionnelle, qui en reversent assez à la population pour la réduire au rôle de consommateur de produits importés. Les années 1990 voient l’épuisement du gisement de phosphate. Son exploitation a dévasté l’île. Les dirigeants nauruans ont confié le magot du phosphate à des escrocs australiens. L’île s’endette et monnaye l’installation sur son sol de banques off-shore ou de centres de rétention pour immigrés clandestins pris en Australie, ses votes dans diverses instances internationales, et même des passeports falsifiés ! Mais la route qui fait le tour de l’île est jonchée de 4x4 rouillés et l’hôpital tombe en ruine et manque d’ambulance...

On peut regretter que l’auteur n’explique pas davantage les causes du désastre, en particulier le rôle des multinationales. Mais le reportage est percutant.

M.P.


Roman

Histoire de mes assassins , de Tarun J Tejpal

Buchet/Chastel, 590 pages, 25 €.

Tarun J Tejpal, écrivain indien, est aussi un journaliste courageux, fondateur du site d’information et d’investigation « Tehelka.com » et du magazine du même nom. Plusieurs fois menacé de mort et victime de harcèlement moral et économique pour avoir révélé en 2001 une affaire de corruption qui fit tomber le ministre de la Défense, Tejpal raconte aussi dans son roman l’histoire d’un journaliste menacé de mort et celle de ses cinq assassins potentiels.

C’est un livre foisonnant, une fresque hallucinante de l’Inde d’en bas, celle de millions de pauvres, de sous-prolétaires faméliques, comme ces ouvriers agricoles migrants de l’Uttar Pradesh oriental et du Bihar, parcourant des centaines de kilomètres avec femmes et enfants à pied, en bus, en camion et en train pour chercher du travail, moissonner le blé, planter le riz, couper la canne à sucre.

À travers l’histoire de ses cinq assassins, l’auteur fait le portrait d’un pays pauvre, avec ses violences sociales, tribales, religieuses et ethniques qu’attisent et dont profitent des politiciens cyniques et corrompus, des hommes d’affaires avides et sans scrupules et des jeunes de bidonvilles, obligés de fuir la campagne, manipulés par les mafias, embauchés pour écouler la drogue, exécuter des « contrats » et survivant dans des conditions inimaginables. Il montre que ces jeunes meurtriers naïfs et ignorants sont en fait les victimes de la misère et des mafias qui les exploitent.

Ce roman captivant est un réquisitoire implacable contre les classes dominantes, un « J’accuse » à la Zola qui prend le contre-pied de l’image d’Epinal, certes bien ternie, d’un pays ayant le culte de la non-violence et célébré pour son « miracle économique ».

Charles BOSCO

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